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31 - Fils naturelle /

Je voulus connoître cet homme. Je le connus, & je le trouvai tel qu'on me l'avoit dépeint, sombre & mélancoli que. Le chagrin & la douleur, en sor tant d'une ame où ils avoient habité trop long-tems, y avoient laissé la tristesse. Il étoit triste dans sa conversation & dans son maintien, à moins qu'il ne 4 parlât de la vertu, ou qu'il n'éprouvât les transports qu'elle cause à ceux qui en sont fortement épris. Alors vous eussiez dit qu'il se transfiguroit. La sérénité se déployoit sur son visage. Ses yeux prenoient de l'éclat & de la douceur. Sa voix avoit un charme inexprimable. Son discours devenoit pathétique. C'étoit un enchaînement d'idées austeres & d'imagestouchantes qui tenoient l'attention suspendue & l'ame ravie. Mais, comme on voit le soir, en automne, dans un tems nébuleux & couvert, la lumiere s'échapper d'unnuage, briller un moment, & se perdre en un ciel obscur; bientôt sa gaieté s'éclipsoit, & il retomboit tout-à-coup dans le silence & la mélancolie.


32 - Fils naturelle /

Vous savez si j'aime Rosalie! ..... Mais non, vous n'en savez rien. Devant les autres, l'amour est ma premiere vertu; j'en rougis presque devant vous .... Eh bien! Dorval, je rougirai, s'il le faut; mais je l'adore ..... Que ne puis-je vous dire tout ce que j'ai fouffert! Avec quel ménagement, quelle dé licatesse j'ai imposé silence à la passion la plus forte! .... Rosalie vivoit retirée, près d'ici, avec une tante. C'étoit une Américaine fort âgée, une amie de Constance. Je voyois Rosalie tous les jours, & tous les jours je voyois augmenter ses charmes; je sentois augmenter mon trouble. Sa tante meurt. Dans ses derniers momens, elle appelle ma sœur, lui tend une main défaillante; & lui montrant Rosalie qui se désoloit au bord de son lit, elle la regardoit sans parler; ensuite elle regardoit Constance; des larmes tomboient de ses yeux; elle soupiroit; & ma sœur entendoit tout cela. Rosalie devint sa compagne, sa pupille, son éleve; & moi, je fus le plus heureux des hommes. Constance voyoit ma passion: Ro- 26 LE FILS NATUREL, salie en paroissoit touchée. Mon bonheurn'étoit plus traversé que par la volonté d'une mere inquiette qui redemandoit sa fille. Je me préparois à passer dans les climats éloignés où Rosalie a pris naissance: mais sa mere meurt; & son pere, malgré sa vieillesse, prend le parti de revenir parmi nous.


33 - Fils naturelle /

Dans sa douleur, qu'elle m'a paru belle! Que ses charmes étoient touchans! J'aurois donné ma vie pour recueillir une des larmes qui couloient de ses yeux ... Dorval, vous le savez .... Ces mots retentissent encore dans le fond de mon cœur .... Ils ne sortiront pas sitôt de ma mémoire! ...


34 - Fils naturelle /

Je gagerois presque que, dans la quatrieme scène du second acte, il n'y a pas un mot qui ne soit vrai. Elle m'a désolédans le sallon, & j'ai pris un plaisir infini à la lire. Le beau tableau! car c'en est un, ce me semble, que le malheureux Clairville renversé sur le sein de son ami, comme dans le seul asyle qui lui reste

35 - Fils naturelle /

A-propos de cette scène de désespoir; elle est singuliere. J'en avois été vivement affecté dans le sallon. Jugez combien je fus 156 DE LA POÉSIE surpris à la lecture, d'y trouver des geftes & point de discours

36 - Fils naturelle /

Ce que je vis encore dans cette scène, c'est qu'il y a des endroits qu'il faudroit presque abandonner à l'acteur. C'est à lui à disposer de la scène écrite, à répéter certains mots, à revenir sur certaines idées, à en retrancher quelques-unes, & à en ajoûter d'autres. Dans les cantabilé, le musicien laisse à un grand DRAMATIQUE. 165 chanteur un libre exercice de son goût & deson talent. Il se contente de lui marquer les intervalles principaux d'un beau chant. Le poëte en devroit faire autant, quand il con noît bien son acteur. Qu'est-ce qui nous affecte dans le spectacle de l'homme animé de quelque grande passion? Sont - ce ses discours? Quelquefois. Mais ce qui émeut toujours, ce sont des cris, des mots inarticulés, des voix rompues, quelques monosyllabes qui s'échappent par intervalles; je ne sais quel murmure dans la gorge, entre les dents. La violence du sentiment coupant la respiration & portant le trouble dans l'esprit, les syllabes des mots se séparent, l'homme passe d'une idée à une autre. Il commence une multitude de discours. Il n'en finit aucun; &, à l'exception de quelques sentiments qu'il rend dans le premier accès & auxquels il revient sans cesse, le reste n'est qu'une suite de bruits foibles & confus, de sons expirants, d'accents étouffés que l'acteur connoît mieux que le poëte. La voix, le ton, le geste, l'action; voilà ce qui appartient à l'acteur: & c'est cequi nous frappe, sur-tout dans le spectacle des grandes passions. Cest l'acteur qui donne au discours tout ce qu'il a d'énergie. Cest lui 166 DE LA POÉSIE qui porte aux oreilles la force & la vérité del'accent.


37 - Fils naturelle /

Mais dans l'art, ainsi que dans la nature, tout est enchaîné; si l'on se rapproche d'un côté de ce qui est vrai, on s'en rapprochera de beaucoup d'autres. C'est alors que nous verrons sur la scène des situations naturelles qu'une décence ennemie du génie & des grands effets a proscrites, Je ne me lasserai 190 DE LA POÉSIE point de crier à nos François: La Vérité! La Nature! Les Anciens! Sophocle! Philoctete! Le poëte l'a montré sur la scène, couché à l'entrée de sa caverne, & couvert de lambeaux déchirés. Il s'y roule; il y éprouve une attaque de douleur; il y crie; il y fait entendre des voix inarticulées. La décoration étoit sauvage; la piece marchoit sans appareil. Des habits vrais, des discoursvrais, une intrigue simple & naturelle. No- tre goût seroit bien dégradé, si ce spectacle ne nous affectoit pas davantage que celui d'un homme richement vêtu, apprêté dans sa parure.


38 - Fils naturelle /

Mais si le concours d'un grand nombre DRAMATIQUE. 193 d'hommes devoit ajoûter à l'émotion du spectateur, quelle influence ne devoit-il point avoir sur les auteurs, sur les acteurs? Quelle différence entre amuser tel jour, depuis telle jusqu'à telle heure, dans un petit endroit obscur, quelques centaines de personnes, ou fixer l'attention d'une nation entiere dans ses jours solemnels, occuper ses édifices les plussomptueux, & voir ces édifices environnés& remplis d'une multitude innombrable, dontl'amusement ou l'ennui va dépendre de notre talent!


39 - Fils naturelle /

Vous voyez que cette espece de drame où les traits les plus plaisans du genre comiquesont placés à côté des traits les plus touchansdu genre sérieux, & où l'on saute alternativement d'un genre à un autre, ne sera pas sans défaut aux yeux d'un critique sévere.


40 - Fils naturelle /

Rosalie vient: Constance & Clairville se retirent. Cette scène est celle de la timidité, de la naïveté, des larmes, de la douleur & du repentir. Rosalie voit tout le mal qu'elle a fait; elle en est désolée. Pressée entre l'a mour qu'elle ressent, l'intérêt qu'elle prend à Dorval, le respect qu'elle doit à Constance, & les sentimens qu'elle ne peut refuser à Clairville; combien elle dit de choses touchantes! Dorval paroît d'abord ni ne la voir, ni ne l'écouter. Rosalie pousse des cris, lui prend les mains, l'arrête, & il vient unmoment où Dorval fixe sur elle des yeux égarés: ses regards sont ceux d'un homme qui sortiroit d'un sommeil léthargique. Cet effort le brise; il tombe dans un fauteuil comme un homme frappé: Rosalie se retire en poussant des sanglots, se désolant, s'arrachant les cheveux.


41 - Fils naturelle /

Que trop, peut - être. Qui sait si nous irions chercher au théâtre des impressions aussi fortes? On veut être attendri, touché, effrayé; mais jusqu'à un certain point

42 - Der natürliche Sohn /

Ich wollte diesen Mann kennen lernen. Ich lernte ihn kennen, und fand ihn so, wie man mir ihn abgemalet hatte, finster und melancholisch. Verdruß und Schmerz hatten aus einer Seele, in welcher sie allzulange gewohnet, nicht anders als mit Zurücklassung der Traurigkeit, scheiden können. Er war, sowohl in seinen Unterredungen, als in 18 seinem äusserlichen Betragen, traurig; ausgenommen,wenn er von der Tugend sprach, oder die Entzückungen fühlte, die sie in ihren eifrigsten Verehrern hervorbringt. Alsdann war er, wie ganz verwandelt.Die Heiterkeit entwickelte sich auf seinem Gesichte. Seine Augen bekamen Glanz und Freundlichkeit.Seine Rede ward pathetisch. Es war eine Kette von strengen Ideen und rührendenBildern, wodurch die Aufmerksamkeit in einem beständigen Feuer erhalten, und die Seele außer sich selbst gesetzet ward.Aber so wie an einem neblichten und umzogenen Herbsttage, die Stralen der Sonne aus einer Wolke hervorbrechen, einen Augenblick glänzen, und sich wieder in den dunkeln Himmel verlieren: so verlor sich auch gar bald seine Munterkeit wieder, undplötzlich fiel er in sein melancholisches Stillschweigen zurück.


43 - Der natürliche Sohn /

Sie wissen, ob ich Rosalien liebe! -- Doch nein, Sie wissen hiervon nichts. Gegen andere ist die Liebe meine erste Tugend; vor Ihnen erröthe ich fast darüber. -- Nun gut, Dorval, ich will erröthen, wenn ich muß; aber ich bete sie an. -- Wenn ich Ihnen alles sagen könnte, 36 was ich erlitten habe! Mit welcher Behutsamkeit, mit welcher zärtlichen Gewissenhaftigkeit ich der allerstärksten Leidenschaft Stillschweigen auferlegt habe! -- Rosalia lebte hier in der Nähe, eingezogen, in der Gesellschaft einer Muhme. Es war eine sehr betagte Amerikanerin, eine Freundin von Theresen. Ich sahe Rosalien alle Tage, und alle Tage sahe ich ihre Reitze sich vermehren; mit ihnen vermehrte sich zugleich meine Unruhe. Ihre Muhme stirbt. In ihren letzten Augenblicken ruft sie meine Schwester, strecket ihre schwache Hand gegen sie aus, weiset auf Rosalien, die neben ihrem Bette trostlos jammert, und siehet sie starr an, ohne ein Wort zu reden; darauf heftet sie ihre Augen auf Theresen; Thränen stürzen aus ihren Augen; sie seufzet; und meine Schwester verstehet alles. Rosalia ward ihre Gespielin, ihr Mündel, ihre Schülerin; und ich, ich ward der glücklichste unter allen Menschen. Theresa bemerkte meine Leidenschaft; Rosalia schien davon gerührt zu seyn, und meinem Glücke war weiter nichts im Wege, als der Wille einer bekümmerten Mutter, die ihre Tochter wiederforderte. Schon machte ich mich gefaßt, in die entfernte Gegend zu ziehen, wo Rosalia das Licht erblicket: aber ihre Mutter stirbt; und ihr Vater fasset, seines hohen Alters ungeachtet, den Entschluß, zu uns zurück zu kehren.


44 - Der natürliche Sohn /

Wie schön schien sie mir in ihrem Schmerze! Wie rührend waren ihre Reitze! Ich hätte mein Leben darum gegeben, wenn ich eine von den Thränen, die aus ihren Augen flossen, hätte aufsammeln können. -- Dorval, das wissen Sie. -- Die 48se Worte ertönen noch in dem Innersten meines Herzens. -- -- Sie werden mir sobald nicht aus dem Gedächtnisse kommen.


45 - Der natürliche Sohn /

Ich wollte fast wetten, daß in dem vierten Auftritte des zweyten Aufzuges, kein Wort ist, das nicht wahr wäre. Sie hat mich in dem Saale aufs äußerste gerührt, und ich habe sie mit unendlichem Vergnügen gelesen. Welch ein schönes Gemälde! Denn ein Gemälde ist es doch wohl, wenn der unglückliche Clairville in den Armen seines Freundes, als dem einzigen Schutzorte liegt, der ihm noch übrig ist.