Suchbegriff: mago
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Il y avoit entre les deux Armées un terrain qu'Annibal jugea propre à ce dessein. C'étoit une plaine rase & découverte, où couloit un ruisseau, dont les bords assez hauts étoient encore hérissés de brossailles & d'épines, & près duquel se trouvoient des cavités assez profondes pour y cacher même de la cavalerie. Il savoit que souvent une embuscade est plus sure dans un terrain plat & uni, mais fourré comme étoit celui-là, que dans des bois, parce qu'on s'en défie moins. Il ordonna à Ma gon son frére de s'y poster avec deux mille hommes tant de cavalerie que d'infanterie. Il fit ensuite passer la Trébie aux cavaliers Numides, avec ordre de s'avancer dès le point du jour jusques aux portes du camp des ennemis pour les attirer au combat, & de repasser la riviére en se retirant, afin d'engager les Romains à la passer aussi, & à entrer dans la plaine. Ce qu'il avoit prévu ne manqua pas d'arriver. Le bouil lant Sempronius envoya d'abord contre les Numides toute sa cavalerie, puis six mille hommes de trait, qui furent bientôt suivis de tout le reste de l'Armée. Les Numides lâchérent pié à dessein. Les Romains les poursuivirent avec chaleur.


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Annibal, bien informé que le fond en étoit ferme, leva le camp, & fit son avant-garde des Africains, des Espagnols, & de tout ce qu'il avoit de meilleures troupes. Il y entre-mêla le bagage, afin que, s'ils étoient obligés de s'arrêter, ils ne manquassent de rien. Le corps de bataille étoit composé de Gaulois, & la cavalerie faisoit l'arriére-garde. Il en avoit donné la conduite à Magon, avec ordre de faire avancer de gré ou de force les Gaulois, en cas que par lâcheté ils parussent se rebuter, & vouloir rebrousser chemin.


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Die GcgendGegend zwischen beyden Armeenschien ihm zu seinem Vorhaben sehr dienlichzu seyn. Sie war frey und eben, und esfloß ein Fluß durch dieselbe, dessen Uferziemlich hoch und mit Gebüschen und Heckenbesetzt waren. Es waren auch Hölen undTiefen daselbst, worinnen er selbst viel Reute Vom andern Punischen Kriege. 411rey verstecken konnte. Er wußte, daß einHinterhalt in einer ebnen und flachen aber dochauch verwachsnen Gegend oft sichrer unddienlicher, als in einem Holze ist, weil mansich hier dessen weniger versieht. Er befahlseinem Bruder, dem Mago, sich hier mitzween tausend Mann theils Cavalerie theilsInfanterie zu verstecken. Er ließ daraufeinige Numidische Reuterey über den Trebiagehn, mit dem Befehl, bey anbrechendemTage sich biß an den Eingang des RömischenLagers zu nähern, um die Feinde zum Treffen zu locken, sich darauf über den Fluß zurück zu ziehen, um die Römer zu reizen, ihnen nach zufolgen und auf die Ebne herüberzu marschiren. Es geschah, was er vorhergesehen hatte. Der hitzige Sempronius schicktewider die Numidier sogleich seine Reutereyfort, darauf sechstausend Bogenschützen undendlich folgte die ganze Armee nach. DieNumidier flohen mit Fleiß, und die Römerverfolgten sie hitzig.


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Hannibal, welcher wohl unterrichtet war,daß der Boden fest wäre, hub sein Lagerauf, und nahm zum Vorzuge die Africaner, Spanier, und die andern besten Truppen. Er mengte Bagage darunter, damitihnen nichts fehlen möchte; in der Mitte be Cn. Servilius und C. Flaminius, Consuln. 435fanden sich die Gallier, und der Nachzug bed. 535. J. n. E. R. d. 217. J. v. C. G.stund aus der Reuterey. Er hatte dem Mago das Commando darüber aufgetragenmit dem Befehle, die Gallier mit Güte oderGewalt zum Marsche zu nöthigen, wofernsie sich weigern und aus Untreue den Wegwieder umkehren wollten.


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Annibal rangea aussi son Armée sur une même ligne. Il mit à la gauche la Cavalerie Espagnole & Gauloise appuyée à l'Aufide, pour l'opposer à la Cavalerie Romaine; & tout de suite une moitié de l'Infanterie Africaine pesamment armée, l'Infanterie Espagnole & Gauloise qui faisoit proprement le centre, l'autre moitié de l'Infanterie Africaine, & enfin la Ca- C. Ter. Varro, L. Æmil. Cons. valerie Numide qui composoit l'aile droiAn. R.536.Av. J. C.216.te. Les gens de trait étoient à la tête vis- à-vis ceux des Romains. Asdrubal avoit la gauche, Hannon la droite, Annibal, aiant avec lui Magon son frére, s'étoit réservé le commandement du centre.


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Annibal, après avoir vaincu lesAnnibalaprès laBataillede Cannes passeen Cam panie.Liv.XXIII. 1. Romains à Cannes, & avoir pris & pillé leur camp, étoit aussitôt passé de l'Apulie dans le Samnium, & étoit entré dans le pays des Hirpiniens, où on lui livra la ville de (a) Compsa. Après y avoir laissé tout son butin & ses bagages, il partagea son Armée en deux corps. Magon, avec l'un, eut ordre de recevoir dans l'alliance des Carthaginois les villes de ces quartiers qui se rendroient d'elles- mêmes, ou de forcer celles qui feroient résistance. Annibal, avec l'autre, traversant toute la Campanie, tira du côté de la Mer (b) Inférieure, dans le dessein de se rendre maître de Naples (Neapolis), afin d'avoir à sa disposition une ville maritime,

(a) Maintenant Conza, dans la Principauté Ultérieure.

(b) Qui baigne les côtes de la Campanie.

C. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.An. R.536.Av. J. C.216.qui le mît en état de recevoir les secours que Carthage lui envoyeroit. Mais aiant considéré de près la hauteur & la solidité des murailles de cette ville, il vit bien qu'il ne gagneroit rien à l'attaquer, & il se désista de cette entreprise.


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Magon porte à Carthage la nouvelle de la victoire de Cannes. Himilcon, de la faction d'Annibal, insulte Hannon. Celui-ci lui répond. Le Sénat ordonne des secours pour Annibal. Le Dictateur, après avoir pourvu à tout, part de Rome.Annibal fait de vaines tentatives sur Naples & sur Nole. Marcellus gagne par ses maniéres prévenantes L. Bantius de Nole. Annibal est battu par Marcellus devant les murailles de cette ville. Citoyens de Nole punis de leur trahison. Annibal attaque Casilin. Quartier d'hiver à Capoue funeste à l'Armée d'Annibal. Réflexion sur le séjour d'Annibal à Capoue. Casilin, forcé par l'extrémité de la disette, se rend à Annibal. Fidélité de Pétélie pour les Romains. Etat des affaires en Sicile & en Sardaigne. Dictateur créé pour nommer de nouveaux Sénateurs à la place des morts. On crée de nouveaux Consuls & de nouveaux Préteurs. L. Postumius, désigné Consul, périt dans la Gaule avec toute son Armée. Cette nouvelle cause un deuil extrême à Rome. Le Sénat régle la disposition des troupes qui doivent servir cette année. Affaires d'Es- pagne peu favorables pour les Carthaginois. Asdrubal reçoit ordre de passer en Italie. Himilcon arrive en Espagne pour prendre sa place. Les deux Scipionsgemeint sind Publius und Gnaeus Scipio,

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Magonporte àCarthagela nouvelle de la vic toire deCannes.Liv.XXIII.12. 13.

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Pendant que ce que nous venons de dire se passoit à Rome & dans l'Italie, Magon fils d'Amilcar étoit allé annoncer à Carthage la bataille & la victoire de Cannes. Il n'étoit pas parti immédiatement après cette action. Avant que de s'embarquer, il s'étoit arrêté pendant quelques jours dans le* Brutium par l'ordre de* L Abruz ze.son frére, pour recevoir dans l'alliance des Carthaginois les villes qui abandonnoient le parti des Romains. Lorsqu'on l'eut admis à l'audience dans le Sénat de Carthage, il y rendit compte de tout ce que son frére avoit exécuté dans l'Italie. Il dit“ qu'Annibal avoit combattu contre sept Généraux, dont cinq étoient Consuls, & des deux autres, l'un Dictateur, & l'autre Général de la Cavalerie. Que dans les différentes batailles qu'il avoit livrées à six Armées Consulaires, il avoit tué plus de deux cens mille ennemis, & en avoit fait prisonniers plus de cinquante mille. Que des cinq Consuls avec qui il avoit eu affaire, il en avoit tué deux sur le champ de bataille; qu'un troisiéme avoit été dangereusement blessé; que des deux autres qui s'étoient retirés sans blessure, le dernier, après la perte de son Armée entiére, s'étoit à peine sauvé avec cin- C. Ter. Varro, L. Æmil. Cons. quante hommes. Que le Général de laAn. R.536.Av. J. C.216. Cavalerie avoit été défait & mis en fuite. Que le Dictateur étoit regardé avec admiration, & passoit pour un Général unique, par cette raison seule qu'il avoit toujours évité le combat. Que les peuples du Brutium & de l'Apulie, avec une partie des Samnites & des Lucaniens, s'étoient rangés du côté des Carthaginois. Que Capoue, la capitale non seulement de la Campanie, mais de toute l'Italie depuis la défaite des Romains à Cannes, s'étoit d'elle-même livrée à Annibal. Qu'il étoit juste de rendre aux Dieux des actions de graces proportionnées aux victoires remportées sur les ennemis par leur protection.“ Ensuite, pour prouver par des effets les succès heureux qu'il avoit étalés dans son discours, il fit répandre dans le vestibule du Sénat un boisseau d'anneaux d'or, qu'on avoit arrachés des doigts de ceux qui étoient restés sur le champ de bataille à Cannes. Il ajouta, pour donner une plus grande idée de la perte que les Romains avoient faite dans cette journée, qu'il n'y avoit que les Chevaliers, & les gens distingués qui fussent en droit d'en porter. Le résultat de sa harangue fut, Que plus ils avoient d'espérance de terminer bientôt la guerre à leur avantage, plus on devoit faire d'efforts pour envoyer toutes sortes de secours à Annibal. Qu'il faisoit la guerre loin de Carthage C. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.An. R.536.Av. J. C.216.au milieu du pays ennemi; que la consommation des vivres & de l'argent alloit très loin; & que tant de batailles n'avoient pu détruire les Armées ennemies, sans affoiblir celle du Vainqueur. Qu'il faloit donc envoyer des recrues, des vivres, & de l'argent à des soldats qui avoient rendu de si grands services à la République de Carthage.“


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Comme ce discours de Magon avoit ré pandu la joie dans toute l'Assemblée, Himilcon, de la faction Barcine, crut avoir trouvé une belle occasion d'insulter Hannon, qui étoit de la faction opposée. Ainsi, s'adressant à lui d'un air moqueur: Hé bien, Hannon, dit-il, que pensez-vous de tout ceci? Etes-vous encore fâché qu'on ait entrepris la guerre contre les Romains? Voulez-vous encore qu'on leur livre Annibal? Parlez, opposez-vous aux actions de graces qu'on propose de rendre aux Dieux. Ecoutons, au milieu du Sénat de Carthage, un Sénateur Romain.


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je regretterai toujours l'ancienne paix, jusqu'à ce qu'on en ait fait une nouvelle. Les avantages que Magon vient de nous étaler, font dès ce moment grand plaisir à Himilcon, & aux autres partisans d'Annibal

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que lui on Magon me répondent. La défaite de Cannes a détruit l'Empire Romain, dites-vous, & toute l'Italie est soulevée contr'eux. Dites-nous donc, si de tous les peuples du Nom Latin il y en a quelqu'un qui ait pris votre parti

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Hannon, d'un air & d'un ton graves, répondit au discours d'Himilcon en ces termes. Je me serois tu aujourd'hui, pour ne point troubler, par un discours qui ne se ra peut-être pas de votre goût, une joie à laquelle je vois que tout le monde s'abandonne. Mais, en ne répondant rien à un Sénateur qui m'interroge, je donnerois lieu de me soupçonner, ou d'une fierté mal entendue, ou d'une bassesse servile: ce qui marqueroit que j'aurois oublié, ou que je parle à unC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.homme libre, ou que moi-même je le suis.An. R.536.Av. J. C.216.Je répons donc à Himilcon, que je n'ai point cessé d'être mécontent de cette guerre, & que je ne cesserai point de me déclarer contre votre invincible Général, que je ne voie la guerre terminée par un Traité dont les conditions soient supportables; & je regretterai toujours l'ancienne paix, jusqu'à ce qu'on en ait fait une nouvelle. Les avantages que Magon vient de nous étaler, font dès ce moment grand plaisir à Himilcon, & aux autres partisans d'Annibal:ils m'en peuvent faire aussi, & je suis très disposé à m'en réjouir comme eux; parce que ces heureux succès, si nous voulons en profiter, peuvent nous procurer des conditions de paix plus favorables. Mais si nous laissons passer une si heureuse conjoncture, où nous pouvons paroître donner la paix plutôt que la recevoir, je crains fort que cette joie, qui maintenant nous transporte, ne nous échappe bientôt, & ne se réduise à rien. Car enfin, que sont après tout ces succès si vantés, & à quoi se terminent-ils? J'ai taillé en piéces les Armées des ennemis;envoyez-moi des soldats: que demanderiez- vous donc, si vous aviez été vaincu? Je me suis emparé de deux camps des ennemis, remplis apparemment de butin & de toute sorte de provisions; envoyez-moi des vivres & de l'argent: que demanderiez-vous autre chose, si vous aviez vous-même perdu votre camp? Mais afin que je ne sois pas ici le seul qu'on mette sur la sellette, (car ilC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.An. R.536.Av. J. C.216.me semble que j'ai autant de droit d'interroger Himilcon, qu'il en a de me faire des questions) que lui on Magon me répondent. La défaite de Cannes a détruit l'Empire Romain, dites-vous, & toute l'Italie est soulevée contr'eux. Dites-nous donc, si de tous les peuples du Nom Latin il y en a quelqu'un qui ait pris votre parti; & si, de tous les citoyens qui composent les trente- cinq Tribus de Rome, il s'en est trouvé un seul qui ait déserté? Magon aiant répondu qui ni l'un ni l'autre n'étoit arrivé. Nous avons donc encore, repliqua-t-il, un très grand nombre d'ennemis sur les bras. Dites-nous au moins, quelle est la disposition des ennemis qui nous restent, & s'ils conservent encore quelque espérance? Magon aiant répondu qu'il n'en savoit rien. Il n'y a cependant rien de si aisé à savoir, reprit Hannon. Avez-vous apris que l'on ait parlé dans le Sénat de Rome de demander la paix? Les Romains ont-ils envoyé des Ambassadeurs à Annibal pour en traiter? Magon aiant répondu que non. Nous avons donc encore la guerre aussi entiére que le jour qu'Annibal passa en Italie, repliqua l'autre. Il y en a plusieurs parmi nous qui se souviennent des vicissitudes de la prémiére guerre. Nos affaires ne furent jamais en un meilleur état ni par terre ni par mer, qu'elles l'étoient avant le Consulat de C. Lutatius & d'Aulus Postumius. C'est sous ce Consulat même que nous fumes vaincus aux Iles Egates. Si la fortune vient auC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.jourd'hui à changer, (plaîse aux Dieux d'enAn. R.536.Av. J. C.216.détourner le présage) avons-nous lieu d'espérer que nous aurons la paix quand nous serons vaincus, pendant que personne ne nous l'offre à présent que nous sommes victorieux? Pour moi, s'il s'agissoit, ou de donner la paix aux Romains, ou de la recevoir d'eux, je sai ce que j'aurois à dire. Mais si vous me consultez sur les propositions de Magon, voici quel est mon sentiment: ou Annibal est victorieux, & en ce cas il n'a pas besoin de secours: ou il nous trompe par de vaines espérances, & pour lors il mérite encore moins d'être écouté.


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Hannon, d'un air & d'un ton graves, répondit au discours d'Himilcon en ces termes. Je me serois tu aujourd'hui, pour ne point troubler, par un discours qui ne se ra peut-être pas de votre goût, une joie à laquelle je vois que tout le monde s'abandonne. Mais, en ne répondant rien à un Sénateur qui m'interroge, je donnerois lieu de me soupçonner, ou d'une fierté mal entendue, ou d'une bassesse servile: ce qui marqueroit que j'aurois oublié, ou que je parle à unC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.homme libre, ou que moi-même je le suis.An. R.536.Av. J. C.216.Je répons donc à Himilcon, que je n'ai point cessé d'être mécontent de cette guerre, & que je ne cesserai point de me déclarer contre votre invincible Général, que je ne voie la guerre terminée par un Traité dont les conditions soient supportables; & je regretterai toujours l'ancienne paix, jusqu'à ce qu'on en ait fait une nouvelle. Les avantages que Magon vient de nous étaler, font dès ce moment grand plaisir à Himilcon, & aux autres partisans d'Annibal:ils m'en peuvent faire aussi, & je suis très disposé à m'en réjouir comme eux; parce que ces heureux succès, si nous voulons en profiter, peuvent nous procurer des conditions de paix plus favorables. Mais si nous laissons passer une si heureuse conjoncture, où nous pouvons paroître donner la paix plutôt que la recevoir, je crains fort que cette joie, qui maintenant nous transporte, ne nous échappe bientôt, & ne se réduise à rien. Car enfin, que sont après tout ces succès si vantés, & à quoi se terminent-ils? J'ai taillé en piéces les Armées des ennemis;envoyez-moi des soldats: que demanderiez- vous donc, si vous aviez été vaincu? Je me suis emparé de deux camps des ennemis, remplis apparemment de butin & de toute sorte de provisions; envoyez-moi des vivres & de l'argent: que demanderiez-vous autre chose, si vous aviez vous-même perdu votre camp? Mais afin que je ne sois pas ici le seul qu'on mette sur la sellette, (car ilC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.An. R.536.Av. J. C.216.me semble que j'ai autant de droit d'interroger Himilcon, qu'il en a de me faire des questions) que lui on Magon me répondent. La défaite de Cannes a détruit l'Empire Romain, dites-vous, & toute l'Italie est soulevée contr'eux. Dites-nous donc, si de tous les peuples du Nom Latin il y en a quelqu'un qui ait pris votre parti; & si, de tous les citoyens qui composent les trente- cinq Tribus de Rome, il s'en est trouvé un seul qui ait déserté? Magon aiant répondu qui ni l'un ni l'autre n'étoit arrivé. Nous avons donc encore, repliqua-t-il, un très grand nombre d'ennemis sur les bras. Dites-nous au moins, quelle est la disposition des ennemis qui nous restent, & s'ils conservent encore quelque espérance? Magon aiant répondu qu'il n'en savoit rien. Il n'y a cependant rien de si aisé à savoir, reprit Hannon. Avez-vous apris que l'on ait parlé dans le Sénat de Rome de demander la paix? Les Romains ont-ils envoyé des Ambassadeurs à Annibal pour en traiter? Magon aiant répondu que non. Nous avons donc encore la guerre aussi entiére que le jour qu'Annibal passa en Italie, repliqua l'autre. Il y en a plusieurs parmi nous qui se souviennent des vicissitudes de la prémiére guerre. Nos affaires ne furent jamais en un meilleur état ni par terre ni par mer, qu'elles l'étoient avant le Consulat de C. Lutatius & d'Aulus Postumius. C'est sous ce Consulat même que nous fumes vaincus aux Iles Egates. Si la fortune vient auC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.jourd'hui à changer, (plaîse aux Dieux d'enAn. R.536.Av. J. C.216.détourner le présage) avons-nous lieu d'espérer que nous aurons la paix quand nous serons vaincus, pendant que personne ne nous l'offre à présent que nous sommes victorieux? Pour moi, s'il s'agissoit, ou de donner la paix aux Romains, ou de la recevoir d'eux, je sai ce que j'aurois à dire. Mais si vous me consultez sur les propositions de Magon, voici quel est mon sentiment: ou Annibal est victorieux, & en ce cas il n'a pas besoin de secours: ou il nous trompe par de vaines espérances, & pour lors il mérite encore moins d'être écouté.


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Hannon, d'un air & d'un ton graves, répondit au discours d'Himilcon en ces termes. Je me serois tu aujourd'hui, pour ne point troubler, par un discours qui ne se ra peut-être pas de votre goût, une joie à laquelle je vois que tout le monde s'abandonne. Mais, en ne répondant rien à un Sénateur qui m'interroge, je donnerois lieu de me soupçonner, ou d'une fierté mal entendue, ou d'une bassesse servile: ce qui marqueroit que j'aurois oublié, ou que je parle à unC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.homme libre, ou que moi-même je le suis.An. R.536.Av. J. C.216.Je répons donc à Himilcon, que je n'ai point cessé d'être mécontent de cette guerre, & que je ne cesserai point de me déclarer contre votre invincible Général, que je ne voie la guerre terminée par un Traité dont les conditions soient supportables; & je regretterai toujours l'ancienne paix, jusqu'à ce qu'on en ait fait une nouvelle. Les avantages que Magon vient de nous étaler, font dès ce moment grand plaisir à Himilcon, & aux autres partisans d'Annibal:ils m'en peuvent faire aussi, & je suis très disposé à m'en réjouir comme eux; parce que ces heureux succès, si nous voulons en profiter, peuvent nous procurer des conditions de paix plus favorables. Mais si nous laissons passer une si heureuse conjoncture, où nous pouvons paroître donner la paix plutôt que la recevoir, je crains fort que cette joie, qui maintenant nous transporte, ne nous échappe bientôt, & ne se réduise à rien. Car enfin, que sont après tout ces succès si vantés, & à quoi se terminent-ils? J'ai taillé en piéces les Armées des ennemis;envoyez-moi des soldats: que demanderiez- vous donc, si vous aviez été vaincu? Je me suis emparé de deux camps des ennemis, remplis apparemment de butin & de toute sorte de provisions; envoyez-moi des vivres & de l'argent: que demanderiez-vous autre chose, si vous aviez vous-même perdu votre camp? Mais afin que je ne sois pas ici le seul qu'on mette sur la sellette, (car ilC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.An. R.536.Av. J. C.216.me semble que j'ai autant de droit d'interroger Himilcon, qu'il en a de me faire des questions) que lui on Magon me répondent. La défaite de Cannes a détruit l'Empire Romain, dites-vous, & toute l'Italie est soulevée contr'eux. Dites-nous donc, si de tous les peuples du Nom Latin il y en a quelqu'un qui ait pris votre parti; & si, de tous les citoyens qui composent les trente- cinq Tribus de Rome, il s'en est trouvé un seul qui ait déserté? Magon aiant répondu qui ni l'un ni l'autre n'étoit arrivé. Nous avons donc encore, repliqua-t-il, un très grand nombre d'ennemis sur les bras. Dites-nous au moins, quelle est la disposition des ennemis qui nous restent, & s'ils conservent encore quelque espérance? Magon aiant répondu qu'il n'en savoit rien. Il n'y a cependant rien de si aisé à savoir, reprit Hannon. Avez-vous apris que l'on ait parlé dans le Sénat de Rome de demander la paix? Les Romains ont-ils envoyé des Ambassadeurs à Annibal pour en traiter? Magon aiant répondu que non. Nous avons donc encore la guerre aussi entiére que le jour qu'Annibal passa en Italie, repliqua l'autre. Il y en a plusieurs parmi nous qui se souviennent des vicissitudes de la prémiére guerre. Nos affaires ne furent jamais en un meilleur état ni par terre ni par mer, qu'elles l'étoient avant le Consulat de C. Lutatius & d'Aulus Postumius. C'est sous ce Consulat même que nous fumes vaincus aux Iles Egates. Si la fortune vient auC. Ter. Varro, L. Æmil. Cons.jourd'hui à changer, (plaîse aux Dieux d'enAn. R.536.Av. J. C.216.détourner le présage) avons-nous lieu d'espérer que nous aurons la paix quand nous serons vaincus, pendant que personne ne nous l'offre à présent que nous sommes victorieux? Pour moi, s'il s'agissoit, ou de donner la paix aux Romains, ou de la recevoir d'eux, je sai ce que j'aurois à dire. Mais si vous me consultez sur les propositions de Magon, voici quel est mon sentiment: ou Annibal est victorieux, & en ce cas il n'a pas besoin de secours: ou il nous trompe par de vaines espérances, & pour lors il mérite encore moins d'être écouté.