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Le Prince de Conty, Frere du Grand Condé, aussi jaloux de son aîné, qu'incapable de l'égaler; le Duc de DE LOUIS XIV.Longueville, le Duc de Beaufort, le Duc de Bouillon, ani- mez par l'esprit remuant du Coadjuteur, & avides de nouveautés, se flattant d'élever leur grandeur sur les ruï- nes de l'Etat, & de faire servir à leurs desseins particu- liers les mouvemens aveugles du Parlement, vinrent lui offrir leurs services. On nomma dans la Grand'Cham- bre les Généraux d'une Armée qu'on n'avoit pas. Cha- cun se taxa pour lever des Trouppes: il y avoit vingt Conseillers pourvus de Charges nouvelles créées par le Cardinal de Richelieu. Leurs Confreres, par une peti- tesse d'esprit, dont toute société est susceptible, sem- bloient poursuivre sur eux la memoire de Richelieu; ils les accabloient de dégoûts, & ne les regardoient pas comme Membres du Parlement: il fallut qu'ils donnas- sent chacun 15000 liv. pour les frais de la Guerre, & pour acheter la tolérance de leurs Confreres.


17 - /

Sans les noms de Roi de France, de Grand Condé, de Capitale du Royaume, cette Guerre de la Fronde eût été aussi ridicule, que celle des Barberins; on ne savoit pourquoi on étoit en armes. Le Prince de Condé assié- gea cinq cens mille Bourgeois avec huit mille Soldats. Les Parisiens sortoient en campagne ornés de plumes & ESSAI SUR LE SIE'CLE de rubans; leurs évolutions étoient le sujet de plaisante- ries des gens du métier. Ils fuyoient dès qu'ils rencon- troient deux cens hommes de l'Armée Royale. Tout se tournoit en raillerie; le Régiment de Corinthe ayant été battu par un petit parti, on appella cet échec, la pre- miére aux Corinthiens.


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Sans les noms de Roi de France, de Grand Condé, de Capitale du Royaume, cette Guerre de la Fronde eût été aussi ridicule, que celle des Barberins; on ne savoit pourquoi on étoit en armes. Le Prince de Condé assié- gea cinq cens mille Bourgeois avec huit mille Soldats. Les Parisiens sortoient en campagne ornés de plumes & ESSAI SUR LE SIE'CLE de rubans; leurs évolutions étoient le sujet de plaisante- ries des gens du métier. Ils fuyoient dès qu'ils rencon- troient deux cens hommes de l'Armée Royale. Tout se tournoit en raillerie; le Régiment de Corinthe ayant été battu par un petit parti, on appella cet échec, la pre- miére aux Corinthiens.


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La Guerre finit, & recommença à plusieurs reprises, il n'y eut personne, qui ne changeât souvent de Parti. Le Prince de Condé, ayant ramené dans Paris la Cour triom- phante, se livra au plaisir de la mépriser, après l'a- voir défenduë; & ne trouvant pas qu'on lui donnât des récompenses proportionnées à sa gloire & à ses ser- vices, il fut le premier à tourner Mazarin en ridi- cule, à braver la Reine, & à insulter un Gouverne- ment qu'il dédaignoit. Il écrivit, à ce qu'on prétend, au Cardinal, à l'illustrissimo Signor Faquino*. Il lui dit, un jour, adieu Mars. Il encouragea un Marquis de Jarsay à faire une déclaration d'amour à la Rei- ne, & trouva mauvais, qu'elle osât s'en offenser. Il se ligua avec le Prince de Conty son frere, & le Duc de Longueville, qui abandonnerent le parti de la Fronde.


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Le Coadjuteur, qui s'étoit déclaré l'implacable en- nemi du Ministére, se réunit secrettement avec la Cour pour avoir un Chapeau de Cardinal, & il sacrifia le Prince de Condé au ressentiment du Ministre. Enfin, ce Prince, qui avoit défendu l'Etat contre les Ennemis, & la Cour contre les Révoltez, Condé au comble de Le 18 Janvier 1650.la gloire, s'étant toûjours conduit en Héros, & jamais en homme habile, se vit arrêté prisonnier avec le Prin- ce de Conty & le Duc de Longueville. Il eût pu gou- verner l'Etat, s'il avoit seulement voulu plaire; mais il se contentoit d'être admiré. Le peuple de Paris, * Mot cruel au Premier Ministre, que son frere appelloit Coglione.DE LOUIS XIV. qui avoit fait des Barricades pour un Conseiller Clerc presque imbecile, fit des feux de joye lorsqu'on mena au Donjon de Vincennes le Défenseur & le Héros de la France.


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Le Coadjuteur, qui s'étoit déclaré l'implacable en- nemi du Ministére, se réunit secrettement avec la Cour pour avoir un Chapeau de Cardinal, & il sacrifia le Prince de Condé au ressentiment du Ministre. Enfin, ce Prince, qui avoit défendu l'Etat contre les Ennemis, & la Cour contre les Révoltez, Condé au comble de Le 18 Janvier 1650.la gloire, s'étant toûjours conduit en Héros, & jamais en homme habile, se vit arrêté prisonnier avec le Prin- ce de Conty & le Duc de Longueville. Il eût pu gou- verner l'Etat, s'il avoit seulement voulu plaire; mais il se contentoit d'être admiré. Le peuple de Paris, * Mot cruel au Premier Ministre, que son frere appelloit Coglione.DE LOUIS XIV. qui avoit fait des Barricades pour un Conseiller Clerc presque imbecile, fit des feux de joye lorsqu'on mena au Donjon de Vincennes le Défenseur & le Héros de la France.


22 - /

Un an après ces mêmes Frondeurs, qui avoient vendu le Grand Condé & les Princes à la vengéance ti- mide de Mazarin, forcerent la Reine à ouvrir leurs pri- sons, & à chasser du Royaume son Premier Ministre. Condé revint aux acclamations de ce même Peuple, qui l'avoit tant haï. Sa présence renouvella les cabales & les dissentions.


23 - /

Un an après ces mêmes Frondeurs, qui avoient vendu le Grand Condé & les Princes à la vengéance ti- mide de Mazarin, forcerent la Reine à ouvrir leurs pri- sons, & à chasser du Royaume son Premier Ministre. Condé revint aux acclamations de ce même Peuple, qui l'avoit tant haï. Sa présence renouvella les cabales & les dissentions.


24 - /

Le Royaume resta dans cette combustion encor quel- ques années. Le Gouvernement ne prit jamais que des Conseils faibles & incertains: il sembloit devoir suc- comber: mais les Révoltés furent toûjours désunis, & c'est ce qui sauva la Cour. Le Coadjuteur tantôt ami, tantôt ennemi du Prince de Condé, suscita con- tre lui une partie du Parlement & du Peuple: il osa en même - tems servir la Reine, en tenant tête à ce Prince, & l'outrager, en la forçant d'éloigner le Car- dinal Mazarin, qui se retira à Cologne. La Reine par une contradiction trop ordinaire aux Gouvernemens faibles, fut obligée de recevoir à la fois ses services & ses offenses, & de nommer au Cardinalat ce même Coadjuteur, l'Auteur des Barricades, qui avoit con-

traint la Famille Royale à sortir de la Capitale, & à l'assiéger.


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Enfin Condé se résolut à une Guerre, qu'il eût dû com- mencer du tems de la Fronde, s'il avoit voulu être le maître de l'Etat, ou qu'il n'auroit dû jamais faire, s'il avoit été Citoyen. Il part de Paris, il va soulever la Guienne, le Poitou & l'Anjou, & mandier contre la France le se- cours des Espagnols, dont il avoit été le fléau le plus terrible.


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Rien ne marque mieux la manie de ce tems, & le déréglement qui déterminoit toutes les démarches, que ce qui arriva alors à ce Prince. On lui envoya un Cou- rier de Paris avec des propositions, qui devoient l'enga- ger au retour & à la paix. Le Courier se trompa, & au-lieu d'aller à Angerville, où étoit le Prince, il alla à Augerville. La lettre vint trop tard. Condé dit, que s'il l'avoit reçuë plûtôt il auroit accepté les propositions de paix; mais puisqu'il étoit déja assez loin de Paris, ce n'étoit pas la peine d'y retourner. Ainsi l'equivoque d'un Courier, & le pur caprice de ce Prince replongea la France dans la Guerre Civile.


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On fait dire au Roi dans une déclaration de ce tems- là, que le Cardinal avoit en effet levé ces Troupes de son DE LOUIS XIV. argent; ce qui doit confondre l'opinion de ceux qui ont écrit, qu'à sa premiére sortie du Royaume, Mazarin s'é- toit trouvé dans l'indigence. Il donna le commande- ment de sa petite Armée au Maréchal d'Hoquincourt. Tous les Officiers portoient des Echarpes vertes, c'étoit la couleur des Livrées du Cardinal. Chaque parti avoit alors son Echarpe. La blanche étoit celle du Roi, l'isa- belle celle du Prince de Condé. Il étoit étonnant que le Cardinal Mazarin, qui avoit jusques alors affecté tant de modestie, eût la hardiesse de faire porter ses Livrées à une Armée, comme s'il avoit eu un parti différent de ce- lui de son maître; mais il ne put résister à cette vanité. La Reine l'approuva. Le Roi déja majeur, & son Frere, vinrent au-devant de lui.


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Précisément dans le tems que cette Compagnie s'a- bandonnoit à ces extrémitez contre le Ministre du Roi, elle déclaroit Criminel de Léze - Majesté le Prince de Condé, qui n'étoit armé que contre ce Ministre; & par un renversement d'esprit, que toutes les démarches précédentes rendent croyable, elle ordonna, que les nouvelles Troupes de Gaston, Duc d'Orleans, marche- roient contre Mazarin, & elle défendit en même tems qu'on prît aucuns deniers dans les Recettes publiques pour les soudoyer.


29 - /

Le Parlement de Bordeaux servoit alors le Prince de Condé; mais il tint une conduite plus uniforme, parce- qu'étant plus éloigné de la Cour, il étoit moins agité par des Factions opposées.


30 - /

Condé, ligué avec les Espagnols, étoit en campagne contre le Roi; & Turenne ayant quitté ces mêmes Espa- gnols, avec lesquels il avoit été batu à Retel, venoit de faire sa paix avec la Cour, & commandoit l'Armée- Royale. L'épuisement des Finances ne permettoit ni à l'un ni à l'autre des deux Partis d'avoir de grandes d'Ar- mées; mais de petites ne décidoient pas moins du sort de l'Etat. Il y a des tems où cent mille hommes en cam- pagne peuvent à peine prendre deux Villes: il y en à d'autres où une bataille entre sept ou huit mille hommes peut renverser un Trône, ou l'affermir.